Fin juillet, mon ami André Buonomo m'adressait par mail ce retour de lecture concernant l'ouvrage publié fin juin sous le titre : "Oser savoir". Le voici, en chronique.
« Tu as pu lire Kant ? », m’écrit Richard. « Oui bien sûr » lui ai-je répondu, mais comme je ne lui avais pas transmis de retour écrit, je lui demandais spontanément de pardonner mon farniente estival ! Aussitôt, je relisais son court ouvrage publié dans la collection fondateurs pour me remémorer sur quelles pierres fondatrices de la construction reposait ce « Oser savoir » en référence à Kant.
En introduction, une première citation de Victor Hugo, choisie par Richard, annonçait la force propulsive de l’immense remise en question qui allait suivre. L’auteur des Misérables, affirmait que « La volonté trouve. La liberté choisit. Trouver et choisir c’est penser » ! Mon programme actuel de Côte d’Azur, bateau, Sunset et apéro avec modération, me nettoyait littéralement le cerveau. Je m’étais enfermé dans un labyrinthe qui ne faisait que renforcer mon envie de ne rien écrire à cause des tours d’hélice des délices de l’été.
Ce manque de volonté affirmé ne trouvait ni temps disponible ni liberté de choisir sur ce « quoi écrire » ou de « que dire de plus ». Je prenais soudain conscience du vide de mes pensées ! Ce n’était pas une question de vacances mais assurément une question de vacuité de neurones non connectés. Je me laissais vivre sans penser. Richard m’avait surpris en flagrant délit !
En voyant le titre de la page suivante : « Le courage d’écrire », je me couvrais de honte. Richard rappelait que Kant implorait « qu’écrire constitue le bien le plus précieux de l’Humanité pensante qu’il nous faut absolument préserver » J’avançais donc à pas feutrés dans ce petit livre aux grands principes éthiques sur le chemin de la vie. Avec ma petite lumière de LED alimentée seulement par le réchauffement de mon cerveau au soleil sans ombrelle, qu’allais-je encore découvrir de décoiffant ?
Ce Kant était vraiment visionnaire dans son oeuvre Qu’est-ce que les Lumières (1784), et Richard agrandissait à la loupe cette vision percutante. Je voyais exploser des étoiles filantes de remords dans mon univers de 2021. J’étais « responsable de mon aveuglement, de ma mise sous tutelle, de ma passivité ». Comme ce monde d’aujourd’hui vacillait sous Covid - terrorisme, guerre, famine mais aussi égoïsme, incivilité, injustice, mégalomanie, course à la notoriété, idolâtrie, préjugés, rumeurs, désinformation et mensonges -, j’évitais de plus en plus de me confronter aux autres : l’inverse du chemin préconisé.
Ainsi, j’étais loin du « rayon Kant » montré par Richard qui définissait comme « citoyen du monde » celui qu’il qualifiait « d’être de raison, acteur d’une République enfin universelle puisqu’elle transcende les Etats ». Cependant, en poussant la curiosité jusqu’au bout de cette lecture, Richard extrayait aussi la définition de l’éthique de l’ouvrage de Kant, Fondement de la métaphysique des Moeurs (1785). Autour de cette dernière, jaillissait alors un nouveau feu d’artifice dont quelques neutrinos pouvaient être porteurs de nouveaux espoirs.
Et Richard de préciser que : « Oser savoir, c’est passer du devoir qui m’est imposé à l’action qui s’impose à moi » et d’indiquer « qu’il me faut impérativement sortir de ma zone de confort. » Par ces mots, le guerrier qui dormait en moi reprenait l’espoir du combat chevaleresque pour se sentir « un homme libre et de bonne moeurs ». Sous ces lignes, je ressentais le besoin perpétuel de rechercher sa propre autonomie en toutes circonstances, aussi bien en agissant sous l’ordre de la règle en tant « qu’acteur dans le système » ou bien, en tant que « savant » comme le dit Kant, non pas pour s’émanciper de celle-ci mais pour pouvoir en discuter avec recul.
Merci Richard pour ce précieux rappel qui aura une longue vie, comme toute idée qui construit une cathédrale humaine avec une éthique d’équerre. Livre à glisser sous l’oreiller et à relire dès que nos faiblesses apparaissent, pour retrouver le sens d’une petite voix interne qui montre une nouvelle voie possible. Comme le dit Edgar Morin dans La Méthode 4 : « Nous avons besoin, finalement et fondamentalement, que se cristallise et s’enracine un paradigme de complexité ». Complexe, ce n’est pas forcément compliqué… C’est ce qui perpétue l’espoir de réussir..."
3 commentaires:
En démêlant le tien du mien et en passant finalement outre, ce texte quasiment commun m'a beaucoup plu et, plus encore, rasséréné. Effectivement, s'intéresser, se confronter au "Complexe" me parait essentiel et salvateur. Ce "Complexe" et le recul qu'il oblige, qu'il impose quasiment, s'incruste dans la chair et dans l'esprit humain. S'incruste tellement qu'il en est sans doute le reflet. Comme l'œuf et la poule sont intiment mêlés, la nature humaine et la réflexion puissante, complexe, le sont aussi. Loin, très loin des systèmes mécaniques, binaires et simplistes que l'on tente de nous imposer. Et, comme le dit Kant, la tentative d'écriture de ces réflexions de ces quelques profondeurs, recherches, ne peut qu'être salvateur aux pauvres humains que nous sommes, perdus dans ce monde, parfaitement décrit ci-dessus, de catastrophes et malheurs variés.
Pour parler un peu de ce rugby qui nous intéresse tant et aussi, et qui est, nous le savons bien, un reflet du monde social, une sorte de modèle proportionnel du socius comme le "petit autre" l'est au "grand Autre" chez Lacan, une sorte d'homothétie par réduction proportionnelle du monde total, ce rugby donc, me désole à chaque fois que, pour des raisons souvent mercantiles, les dirigeant du Board s'ingénient à le simplifier afin d'attirer une plus grande masse "d'amateurs". Efforts à mon avis inutiles et vains, sauf à diluer tellement l'originalité de ce jeu si riche et savoureux, qu'à force d'y supprimer toutes difficultés et aspérités originales ils créeront, à l'inverse du Christ des Noces De Cana transformant l'eau en vin, une sorte d'animal sans âme ni chair à l'image du monstre de Frankenstein.
MERCI andre pour ce riche commentaire
Suis en train de rire à la lecture édifiante et pertinente d'un ouvrage de Botul sur la vie sexuelle de Kant. Je vous le conseille...
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